La famille Fiszow

Devenue capitale du nouvel « État français », Vichy constitue le symbole d’une France façonnée selon les idéaux du maréchal Pétain et de son gouvernement. Craignant que les Juifs, présents en grand nombre, ne troublent l’ordre public et ne ternissent l’image de la ville, Pierre Laval déclare, dès le mois d’août 1940, vouloir s’en « débarrasser ». Très vite, les premières mesures sont prises. Des milliers de Juifs se retrouvent alors visés par des décisions d’éloignement, parmi lesquels la famille Fiszow.

Joseph, le père, né en Pologne, est apatride, Anne, la mère, ainsi que leurs enfants, originaires de Moselle, sont français par réintégration. Au début de la guerre, la famille fuit Thionville et se réfugie à Vichy. Le 26 août 1941, elle reçoit un ordre d’expulsion, lui enjoignant de quitter la ville dans un délai d’un mois. Le 26 septembre, n’ayant trouvé aucune solution de repli, elle demande un sursis aux autorités. Peu après, faute d’alternative, les Fiszow s’installent chez les parents d’Anne, réfugiés à Saint-Pourçain, à une trentaine de kilomètres de Vichy.

En 1942, la famille cherche à régulariser sa situation et sollicite l’autorisation de s’installer durablement à Saint-Pourçain. Les documents ci-dessus témoignent de la lourdeur des démarches administratives liées aux expulsions des Juifs à Vichy, pour lesquelles de nombreux services étaient mobilisés : la police nationale, la police régionale, la gendarmerie de l’Allier, le préfet, le sous-préfet de Vichy, le Commissariat général aux Questions juives, ainsi que la police aux Questions juives — devenue la Section d’enquête et de contrôle en 1942.

Il est impossible d’évaluer précisément le nombre d’agents mobilisés pour la mise en œuvre des expulsions, ni le temps qu’elles ont exigé. Il ne fait toutefois aucun doute que cette politique a représenté une charge administrative considérable pour les autorités. Il est frappant de voir qu’en dépit des multiples urgences nationales, les autorités n’ont jamais relégué au second plan leur volonté d’éloigner les Juifs de Vichy. Entre 1940 et 1943, le nombre de Juifs dans la nouvelle capitale passa de plusieurs milliers à 600 individus — une diminution inédite pour une ville de la zone sud.

Sources :
Archives du Mémorial de la Shoah. CMLV- Fonds de la communauté israélite de Vichy.
Archives départementales de l’Allier.
Michael Marrus et Robert Paxton, Vichy et les Juifs, Paris, Calmann-Lévy, 2015.

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